Le régime mère-fille est un dispositif fiscal de renommée pour les groupes de sociétés, permettant aux filiales détenues par une holding de faire circuler efficacement les flux financiers entre elles. Ce régime offre également une optimisation fiscale significative en réduisant l'imposition sur les remontées de dividendes des filiales à la holding. Dans cet article, nous explorerons en détail le fonctionnement, les conditions, les avantages et les inconvénients du régime mère-fille, ainsi que les étapes pour sa mise en place.
Le régime mère-fille : qu'est-ce que c'est ?
Le régime mère-fille est un mécanisme d’optimisation fiscale destiné aux groupes de sociétés souhaitant maximiser l'efficacité fiscale de leurs flux financiers, notamment en ce qui concerne les dividendes. Ce dispositif permet à une société mère, habituellement désignée sous le terme de “holding”, de recevoir les dividendes générés par ses filiales tout en bénéficiant d'une exonération quasi totale de fiscalité. Concrètement, seuls 5 % des dividendes perçus par la holding seront soumis à l'impôt.
En l'absence de ce régime, les dividendes versés par une filiale à sa holding seraient intégralement soumis à l'impôt sur les sociétés (IS). Selon le régime de droit commun, les dividendes seraient imposés au taux réduit de 15 % jusqu'à un bénéfice de 42 500 €, et à 25 % au-delà (pour l’année 2024, ces taux pourraient changer suite au projet de loi de finance pour 2025). Cependant, avec l’application du régime mère-fille, seulement une quote-part de 5 % des dividendes est imposée au taux d’IS en vigueur, ce qui rend ce régime très intéressant pour les sociétés cherchant à optimiser leurs remontées de dividendes.
Rappel de Goodvest : Une holding est une société mère, qui détient des parts ou des titres dans une ou plusieurs autres sociétés, appelées filiales. La holding n’a pas de personnalité juridique, elle peut détenir des sociétés aux formes sociales diverses (SAS, SARL, SCI, etc…) et peut être à l’IR (impôt sur le revenu) comme à l’IS (impôt sur les sociétés).
Le fonctionnement du régime mère-fille
Concrètement, le régime mère-fille fonctionne en exonérant la holding de l'impôt sur les sociétés sur les dividendes qu'elle reçoit de ses filiales, à une exception près : une quote-part de frais et charges, équivalente à 5 % des dividendes perçus, est réintégrée au résultat imposable de la holding et soumise à l'IS. Autrement dit, si une holding perçoit 100 000 € de dividendes de ses filiales, seulement 5 000 € seront soumis à l'IS.
Exemple pour illustrer le fonctionnement et l'efficacité du régime mère-fille
Sans le régime mère-fille :
Base imposable : 100 000 €
Imposition à l’IS :
- Taux réduit : 42 500 € x 15 % = 6 375 €
- Taux plein : 57 500 € x 25 % = 14 375 €
Total de l'imposition : 20 750 €
Avec le régime mère-fille :
Base imposable : 5 000 € (correspondant à la quote-part de 5 % pour frais et charges)
Imposition à l’IS :
- Taux réduit : 5 000 € x 15 % = 750 €
Total de l'imposition : 750 €
Quels sont les produits éligibles au régime mère-fille ?
Plusieurs types de produits provenant des filiales peuvent bénéficier des avantages fiscaux offerts par le régime-mère-fille lorsqu'ils sont remontés à la holding.
Parmi eux, on retrouve :
- Les bénéfices et dividendes,
- Le boni de liquidation,
- Les distributions de réserves, de droits sociaux d'autres entités, ainsi que de droits de souscription,
- Les sommes versées dans le cadre d'un partage partiel ou d'un rachat de droits sociaux,
- Les avances, prêts ou acomptes accordés aux associés,
- Les intérêts excédentaires perçus par la holding et réintégrés dans le bénéfice imposable de la filiale.
En résumé, le régime mère-fille constitue un outil stratégique pour optimiser la fiscalité au sein d'un groupe, notamment en ce qui concerne les dividendes remontés à la holding. En offrant une imposition réduite, voire presque nulle, ce dispositif permet aux entreprises de gérer plus efficacement les flux financiers internes tout en réduisant au maximum les charges fiscales.
Conseil de Goodvest : Saviez-vous que les titres éligibles au régime mère-fille peuvent également bénéficier de l'exonération prévue par la niche Copé ? Cette exonération, souvent méconnue, permet de ne taxer que 12 % de la plus-value réalisée lors de la cession des titres de participation détenus par la holding. Pas d'inquiétude, nous vous expliquerons en détail ce régime dans la prochaine partie dédiée aux avantages du régime mère-fille.
Quelles sont les conditions à respecter pour bénéficier du régime mère-fille ?
Pour bénéficier du régime mère-fille, il est nécessaire de respecter certaines conditions spécifiques, réparties entre les conditions relatives à la holding, aux filiales, et au niveau de détention des titres de la filiale par la holding.
Régime mère-fille : Les conditions relatives à la holding
- La forme juridique de la holding n’est pas importante, elle peut être : une SARL, une SAS, une SA ou encore une société civile…
- La holding doit être établie et avoir son siège social : en France, dans un pays de l’Union Européenne ou dans un pays de l’Espace Économique Européen ayant une convention d’assistance administrative avec la France.
- La holding doit obligatoirement être soumise à l’impôt sur les sociétés (IS). Les holdings entièrement soumises à l'impôt sur le revenu (IR) ne sont pas éligibles au régime mère-fille.
Régime mère-fille : Les conditions relatives aux filiales
- La filiale peut adopter n’importe quelle forme juridique.
- La filiale peut avoir son siège social en France ou à l’étranger.
- La filiale doit impérativement être soumise à l’impôt sur les sociétés (IS).
Régime mère-fille : Les conditions relatives au niveau de détention des filiales par la holding
- La holding doit détenir au minimum 5 % des titres de la filiale.
- Les titres peuvent être détenus en pleine propriété ou en nue-propriété (l’usufruit n’est pas éligible).
- Les titres de la filiale doivent être détenus par la holding pendant au moins 2 ans.
Le régime mère-fille est donc assez facile à mettre en place, les conditions pour en bénéficier étant particulièrement accessibles.
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Les avantages et les inconvénients du régime mère-fille
Les avantages du régime mère-fille
- Une fiscalité attractive sur les dividendes : Le régime mère-fille offre une fiscalité extrêmement avantageuse sur les dividendes. Comme évoqué précédemment, ce régime permet de faire remonter les dividendes d'une filiale à sa holding en n'imposant que 5 % de ces dividendes au titre de l'impôt sur les sociétés (IS). Comparée à la fiscalité classique appliquée aux dividendes, cette optimisation est intéressante pour une holding, permettant ainsi une réduction significative de la charge fiscale sur les dividendes générés par la filiale.
- Une fiscalité attractive sur les plus-values de cession de titres : Outre les avantages fiscaux sur les dividendes, le régime mère-fille permet également de bénéficier d'une fiscalité favorable sur les plus-values réalisées lors de la cession de titres par la holding. Les titres éligibles au régime mère-fille peuvent en effet profiter de l'exonération dite "niche Copé", qui réduit de 88 % l’imposition sur les plus-values de cession. En d’autres termes, seule une quote-part de 12 % sera imposée sur les plus-values réalisées. Il est important de noter cependant que les titres de sociétés à prépondérance immobilière ne sont pas éligibles à ce régime de cession de titres de participation.
- Bénéficier de l’effet de levier fiscal pour le développement de l’activité : Le régime mère-fille constitue un puissant levier fiscal pour le développement de l'activité des groupes de sociétés. En permettant des économies fiscales importantes, il offre une capacité de réinvestissement bien plus grande. Par exemple, les dividendes remontés d’une société d’exploitation à la holding peuvent être réinvestis dans d'autres sociétés commerciales, industrielles, ou même dans l’immobilier via une SCI soumise à l'IS. Ce mécanisme favorise ainsi l'expansion et la diversification des activités du groupe, tout en optimisant la gestion des ressources financières.
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Les inconvénients du régime mère-fille
Malgré ses nombreux avantages, le régime mère-fille présente un inconvénient majeur, qui est plus lié à la structure de la holding qu'au régime lui-même. Ce problème survient lorsque le dirigeant souhaite se rémunérer en dividendes à titre personnel.
Dans ce cas, les dividendes subissent une double imposition :
- Une première imposition lors de la remontée des dividendes de la filiale à la holding,
- Une seconde imposition lors de la distribution des dividendes de la holding au dirigeant. Ces dividendes sont alors soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 % ou, sur option, au barème progressif de l'impôt sur le revenu (IR) après un abattement de 40 %.
Cependant, grâce au régime mère-fille, cette double imposition peut être atténuée, car l’imposition lors des remontées de dividendes à la holding est considérablement réduite. Cela permet de limiter l'impact fiscal global et de préserver une grande partie des avantages financiers offerts par la structure.
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Comment mettre en place le régime mère-fille entre plusieurs sociétés ?
La mise en place du régime mère-fille est relativement simple, à condition de respecter les critères établis précédemment. Si toutes les conditions du régime mère-fille sont remplies, il revient à la holding d'activer cette option, qui doit être renouvelée chaque année.
Pour activer le régime mère-fille, aucune déclaration spécifique n'est requise. L'option prend effet lors de la déclaration fiscale de la holding. Concrètement, il suffit d’inscrire les dividendes distribués par les filiales dans la ligne XA, et la quote-part de frais et charges retenue en ligne 2A du formulaire 2058-A.
Il est important de noter que toutes les filiales détenues par une holding ne sont pas nécessairement éligibles au régime mère-fille. Par exemple, si une holding possède des filiales soumises à l’impôt sur le revenu (IR) et d’autres à l’impôt sur les sociétés (IS), seules les filiales soumises à l’IS peuvent bénéficier de ce régime. Cela n’empêche pas la holding de profiter du régime mère-fille pour ses filiales éligibles, même si certaines filiales ne le sont pas.
Conseil de Goodvest : Saviez-vous qu'il est possible de combiner le régime mère-fille avec le régime d'intégration fiscale ? L'intégration fiscale permet à un groupe de sociétés, détenu par une holding, de consolider les résultats fiscaux de ses filiales. Cela permet de réduire significativement la fiscalité en compensant les bénéfices de certaines filiales par les pertes d'autres filiales.