Comment est calculée l’empreinte biodiversité de nos portefeuilles ?

  • Garance - Analyste ISR
18
March
2024

La relation entre Goodvest et la biodiversité

Toute activité humaine exerce un impact sur la biodiversité et les écosystèmes. Par exemple, la déforestation massive de l’Amazonie est principalement due à l'agriculture (élevage et culture du soja) ; la combustion de combustibles fossiles pour l'industrie et le transport aggrave la pollution de l'air affectant la santé humaine mais aussi animale et végétale ; la surpêche du thon albacore dans l’océan indien, l’espèce que l’on retrouve le plus souvent dans les boîtes de conserve consommées en Europe, menace la survie de l’espèce, etc.

Pourtant, force est de constater que l’impact des entreprises sur la biodiversité dans les décisions d’investissement est souvent négligé. 

Alors que la prise en compte de l’impact climatique des entreprises se généralise, celle de l'impact sur la biodiversité reste très marginale. Cette situation est d'autant plus préoccupante que la limite planétaire liée à la biodiversité a déjà été dépassée. Pire, l’érosion de la biodiversité aggrave le changement climatique, et réciproquement. Climat et biodiversité sont intrinsèquement liés.

Conscients de cette réalité et forts de notre engagement envers une épargne plus durable et respectueuse de l’environnement, nous avons décidé d’intégrer pleinement l’impact des entreprises sur la biodiversité dans notre méthodologie de sélection des fonds. 

Dans cet article, nous vous expliquons comment est calculée l’empreinte biodiversité de nos portefeuilles.

Lire aussi : Investissement responsable : L'Intégration des Limites Planétaires

Nos activités et nos investissements ont un impact sur la biodiversité 

Quelles sont les différentes pressions exercées sur la biodiversité ? 

L’ensemble de nos activités ont un impact, direct ou indirect, sur la biodiversité et la santé des écosystèmes. L'IPBES (Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques), souvent considérée comme le Giec de la biodiversité, identifie cinq pressions majeures exercées sur la biodiversité : 

  • Le changement d’usage des terres et des mers, principalement la conversion des habitats naturels en terres agricoles, urbaines et industrielles, ainsi que de l'exploitation intensive des ressources naturelles telles que les forêts, les pâturages, les zones humides, etc. ;

  • La surexploitation de certains organismes comme la surpêche, la chasse excessive, le commerce illégal d'espèces sauvages… ;

  • Le changement climatique, en raison des événements météorologiques extrêmes (sécheresses, incendies, inondations), de l'acidification des océans ou encore des perturbations migratoires ;

  • La pollution, due à la libération de produits chimiques toxiques, de déchets industriels, agricoles et domestiques dans la nature ;

  • Les espèces exotiques envahissantes, qui peuvent entraîner une concurrence avec les espèces locales, la prédation, la transmission de maladies et la perturbation des chaînes alimentaires.

L’ensemble de ces pressions, induites par nos activités humaines, impactent la biodiversité terrestre et aquatique. 

Empreinte biodiversité, de quoi parle-t-on ? 

L'empreinte biodiversité d’une entreprise désigne l'impact qu'elle exerce sur la biodiversité en raison de son activité, au travers des cinq pressions décrites ci-dessus. Cet impact peut être direct, comme la conversion de forêts en terres agricoles, ou indirect, à travers les chaînes d'approvisionnement et les cycles de production.

L’IPBES distingue également trois catégories d'écosystèmes : terrestres, d'eau douce et marins. 

Par ailleurs, les impacts sur la biodiversité peuvent être comptabilisés à différentes étapes d'une chaîne de valeur. Le concept d'impacts de scopes 1, 2 et 3, largement répandu dans la comptabilisation des gaz à effet de serre, peut également s’appliquer aux impacts sur la biodiversité. 

Enfin, la comptabilisation des impacts dans le temps permet d’évaluer les progrès d’une entité en termes d’impact sur la biodiversité. On distingue donc deux types d’impacts : 

  • Les impacts statiques représentent le stock d'impacts passés accumulés jusqu'au début de l'évaluation. Ils découlent de l’ensemble des pressions qui ont été exercées par une entité dans le passé pour son activité. 
  • Les impacts dynamiques font référence aux gains et pertes périodiques de biodiversité survenant au cours de l'année d'évaluation. En d’autres termes, c’est l’impact qu’une entreprise continue d’avoir sur la biodiversité. 

Comprendre l'empreinte biodiversité d'un investissement nous permet de prendre des décisions plus éclairées, en favorisant les entreprises et les secteurs qui réduisent et minimisent leur impact négatif.

Comment mesurer l’impact d’un investissement sur la biodiversité ? 

Un indicateur d’impact : le MSA.km2

Aujourd’hui, il existe différents indicateurs permettant de mesurer les niveaux de biodiversité. Néanmoins, il n'existe pas encore de consensus ou de protocole mondial, à l’instar du GHG Protocol pour les émissions de gaz à effet de serre. Cela complexifie l’évaluation et la comparaison des impacts sur la biodiversité. Chez Goodvest, nous utilisons le MSA.km2, qui constitue l’indicateur le plus répandu et le plus abouti à ce jour. 

Le MSA (mean species abundance ou abondance moyenne des espèces) est une mesure cruciale pour évaluer la biodiversité. Cet indicateur permet d’exprimer l’abondance relative d’une espèce dans un écosystème par rapport à son abondance dans un écosystème vierge non perturbé. Ainsi, il permet de quantifier de manière concise la santé des écosystèmes et la richesse en espèces d'une région.

Plus le MSA est élevé, plus la biodiversité est importante et stable. Un MSA de 0% signifie que l’écosystème a perdu toute sa biodiversité d’origine, tandis qu’un MSA de 100% signifie que la biodiversité est égale à celle d’un écosystème original non perturbé. Par exemple, un parking correspond à un MSA de 0% ; une forêt vierge de toute activité humaine à un MSA de 100%.

Ce MSA peut ensuite être rapporté à une surface : un impact de 1 MSA.km² équivaut à l'artificialisation de 1 km² d'espaces naturels non perturbés. Par exemple, 1 km² de forêt primaire transformée en parking représente une perte de 100 % de la surface de la forêt, soit 1 MSA.km². 

Le modèle BIA-GBS, co-développé par Carbon4 Finance et CDC Biodiversité

Chez Goodvest, nous utilisons le modèle BIA-GBS pour mesurer l’empreinte biodiversité de nos portefeuilles. 

BIA-GBS signifie Biodiversity Impact Analytics alimenté par le Global Biodiversity Score (GBS). GBS est un outil d'évaluation de l'empreinte biodiversité (biodiversity footprint assessment, BFA) développé par CDC Biodiversité.

Le changement climatique est l'une des pressions les plus impactantes sur la biodiversité et doit être évalué avec précision. C’est pourquoi l'outil GBS est renforcé par l'expertise de Carbon4 Finance dans l'estimation des émissions de gaz à effet de serre sur tous les scopes et pour tous les secteurs, pour diverses entités et instruments financiers, permettant ainsi une estimation plus précise des impacts du changement climatique attribuables à chaque actif au sein d'un portefeuille.

La base de données BIA-GBS nous fournit donc des évaluations de l'empreinte sur la biodiversité calculées à l'aide du GBS, qui exprime les impacts d'une entité sur la biodiversité en MSA.km2. Sur les 5 pressions de l’IPBES, le GBS couvre 4 pressions et 2 catégories d’écosystèmes (terrestres et aquatiques d’eau douce). Les pressions sur les écosystèmes marins et la pression "espèces exotiques envahissantes" ne sont pas encore couvertes par le BIA-GBS, en raison de l'absence de consensus scientifique et de bases de données mondiales solides. 

Quelles sont les différentes étapes pour mesurer l’empreinte biodiversité ?

  1. Chaque acteur économique va faire l’objet d’une analyse précise en fonction de son secteur et sa zone géographique.
  2. En fonction de l'activité et des revenus de l’entreprise, nous allons pouvoir identifier les matières premières et ressources utilisées grâce au modèle EXIOBASE (il convient de noter que les émissions de gaz à effet de serre sont considérées comme une matière première au sein de la méthodologie GBS). Par exemple, une société d'élevage de volaille génère x € de chiffre d’affaires. Pour arriver à ses fins, elle doit nourrir ses volailles à base de maïs.
  3. Par la suite, grâce aux modèles internes développés par CDC Biodiversité, la ressource va pouvoir être associée à une pression exercée sur la biodiversité. Par exemple, pour x tonnes de maïs, la société a dû exploiter x km2 de sols.
  4. Puis, la pression exercée sur la biodiversité, va pouvoir être traduite en impact concret sur l’intégrité de l'écosystème, grâce au modèle GLOBIO. Par exemple, sur x km2 de surface occupée, j’ai affecté x% de biodiversité.

Quels sont les indicateurs communiqués à nos clients ? 

À la différence des émissions de CO2e, la capacité régénérative des écosystèmes implique de distinguer deux types d’impacts sur la biodiversité. C’est pour cela qu'à l’intérieur de chaque catégorie d'écosystème nous distinguons l’impact en deux indicateurs : 

  • L’impact statique, qui correspond à l’impact passé accumulé jusqu’au début de la période d'évaluation l’évaluation. Par exemple, une société agricole cultive un champ de 3 hectares depuis 50 ans pour la culture de maïs. Jusqu’en 2023, elle a détruit l’équivalent de 3 hectares de biodiversité pour la culture du maïs.

  • L’impact dynamique, qui correspond à l’impact additionnel (gains et pertes) sur la biodiversité survenu au cours de l’année d’évaluation (sur l’année 2023). Par exemple, en 2023, la même société agricole a eu besoin d’un champ plus grand pour cultiver plus de maïs. Elle a donc transformé 2 hectares de forêts pour en faire un nouveau champ. Ainsi, en 2023, elle a affecté 2 hectares de biodiversité supplémentaires.

Cette différenciation nous permet de suivre les progrès des entreprises dans le temps sous deux angles :

  • réduire radicalement leur impact dynamique, donc la vitesse à laquelle les entreprises continuent d’affecter la biodiversité chaque année,
  • et réduire les impacts statiques, donc les espaces déjà occupés nécessaires à l’activité d’une entreprise, permettant ainsi de restaurer les écosystèmes endommagés.

Ainsi, au sein de l’espace client, nous affichons à la fois l’impact sur la biodiversité selon la catégorie d'écosystème (terrestre et aquatique) puis au sein de chaque catégorie d’écosystème, selon le type d’impact (statique et dynamique). Cela donne lieu à quatre valeurs distinctes. 

Le GBS fournit également des mesures agrégées au niveau de l'entreprise et du portefeuille, nous permettant de mesurer la différence d’impact sur la biodiversité entre un portefeuille Goodvest et un portefeuille traditionnel. L’objectif est d’afficher concrètement comment un portefeuille Goodvest réduit les pressions sur la biodiversité face à un portefeuille qui ne tient pas compte de critères de biodiversité. 

Comment cette analyse s’intègre-t-elle dans notre méthodologie ? 

Une analyse comparative 

Pour chaque fonds analysé, nous comparons son empreinte biodiversité à celle d’un indice comparable. Nous nous assurons que l’ensemble de nos fonds affichent un impact sur la biodiversité inférieur à celui de l’indice comparable. En effet, afin de tenir compte de la différence de matérialité existante entre les secteurs d’activité et entre les zones géographiques, nous utilisons des indices de référence sectoriels et géographiques. 

Les fonds sont donc analysés et comparés à leurs indices de référence à partir d’un indicateur agrégé et harmonisé de l’impact sur la biodiversité, afin de tenir compte des différences de temporalité (impacts passés et impact additionnel au cours de la période d’analyse) et des différences de surface entre les écosystèmes (terrestre et eau douce).

Concrètement, un fonds est éligible à notre univers d’investissement dès lors qu’il a un impact sur la biodiversité plus faible qu’un fonds “classique”.

Une contrainte cumulative

Les critères de biodiversité viennent enrichir notre méthodologie Goodvest dont le filtre extra-financier était composé de deux grandes dominantes depuis 2021 :

  • Exclusion sectorielle en excluant les secteurs néfastes tels que le tabac, l'armement, les divertissements pour adultes, les entreprises impliquées dans la production ou l’extraction d'énergies fossiles ainsi que les entreprises qui violent le pacte des Nations-Unies

  • Analyse de l’empreinte carbone permettant d'évaluer la trajectoire de réchauffement climatique de chaque fonds et d’aligner nos portefeuilles sur une trajectoire de maximum 2 degrés à horizon 2100.

Depuis mars 2024, l’analyse de l’impact des entreprises sur la biodiversité vient s’ajouter à ces deux piliers. Il s’agit bien sûr de contraintes cumulatives : chacune d’entre elles doit être respectée pour qu’un fonds puisse intégrer nos portefeuilles. 

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